Le goût du collectif et de la transmission
Pionnier des maisons en ossature bois en Centre-Val de Loire, Charly Thibault est toujours à l’affût des nouvelles tendances. Ainsi, son entreprise trentenaire (charpente, couverture, isolation) cultive le travail collaboratif depuis de nombreuses années.
Compagnon un jour, compagnon toujours… La preuve par l’exemple avec Charly Thibault, qui a fondé son entreprise il y a trente ans en Sud Touraine, à Reignac-sur-Indre, après un long « Tour de France » de 1978 à 1986. « Le Compagnonnage m’a tellement apporté... il m’est impossible de ne pas renvoyer l’ascenseur », assure-t-il. « Faire une ou deux entreprises par an, voyager, apprendre… Le compagnonnage, c’est donner les moyens à l’homme de s’élever par son métier, culturellement et socialement. On forme des hommes avant tout et on inculque une culture du travail. J'accueille régulièrement des futurs compagnons, ce qui me permet, à 57 ans, de garder le lien avec la jeunesse. »
Il y a toujours eu plusieurs compagnons parmi les 11 salariés de l’entreprise Thibault frères. Celle-ci a compté jusqu’à 17 membres, mais le dirigeant a dû se résoudre à licencier il y a deux ans. « Le marché du bâtiment s’est effondré de 30 % en 5 ans », explique Charly Thibault, qui ne travaille désormais que pour des particuliers et des architectes. « Nous ne répondons plus aux appels d’offres, il se raréfient d’ailleurs. Il n’y a plus de grands projets, nous sommes entrés dans une ère d’entretien et de réfection, les équipements ont pour la plupart été déjà construits, la population française ne doublera pas ces prochaines années… »
Pionnier de l’ossature bois, Charly Thibault avait eu le nez creux il y a une quinzaine d’années. « On avait détecté une tendance autour des années 2000 : la construction plus responsable et plus saine. Nous nous sommes lancés doucement, j’avais un peu de connaissances et des équipes très curieuses. On a construit jusqu’à 10 maisons par mois… Mais aujourd’hui, les maisons en ossatures bois ne concernent que 6 % des permis de construire ; ce marché s’est essoufflé. Cette clientèle initiale, ce sont généralement des personnes de 50 ans, qui envisagent l’achat de leur deuxième maison, mais le contexte est plus difficile : vendre devient difficile, il faut de plus en plus aider les enfants et les petits-enfants… »
« L’humain remis au cœur des entreprises »
Malgré cet épisode, l’entreprise (agréée RGE et certifiée Qualibat) a su maintenir le cap toutes ces années durant. Le bureau d’études intégré fait partie des choix qui se sont avérés gagnants, avec le temps. « Les crises successives ont permis une chose : remettre l’être humain au cœur des entreprises. Sans bras, sans têtes, vous courrez à votre perte… Dans notre métier, pour éviter d’être pieds et mains liés, il faut maîtriser en amont les nombreuses études préalables qu'exige l’ossature bois ; nous avons d'ailleurs repensé notre production. Avant, on livrait les charpentes projet par projet ; aujourd’hui, nous sommes capables de ravitailler six chantiers en même temps. Aujourd’hui, nous avons cette liberté de proposer ce que l’on veut et notre coopérative nous suit. »
Chantiers mixtes artisan-client
Habitué du travail collaboratif, notamment via sa centrale d’approvisionnement vosgienne, Charly Thibault voit donc d’un bon œil l’émergence de la filière écoconstruction en Sud Touraine. « Si cette plate-forme peut aider à capter des aides financières - qui constitue souvent un parcours du combattant -, mais aussi à nous crédibiliser, à développer une culture du « travailler ensemble » localement, il faut expérimenter ! C’était notamment l’esprit initial des RGE avec les modules Feebat. » Charly Thibault est également attentif à une autre tendance : les chantiers mixtes. « De plus en plus, les clients, les particuliers, veulent co-construire, déléguer une partie du chantier seulement. Nous vendons des journées de formation pour les accompagner dans cette démarche, c’est intéressant et bénéfique pour tout le monde. »